MOPO : des outils en pagaille à Troyes

C'est dans l'hôtel particulier du 7 rue de la Trinité à Troyes que nous accueil Christophe Cheutin. Nous traversons les couloirs et les escaliers de l'hôtel particulier où le musée se trouve pour nous retrouver dans son bureau.

Il nous explique :

Le MOPO est un musée labellisé musée de France et patrimoine culturel, géré par les compagnons du devoir dont je fais partie. Nous exposons dans notre collection permanente une sélection de 12.000 outils des XVIIe et XVIIIe siècle, c'est la plus grande collection de ce type à ce jour. A savoir qu'il y a 30.000 outils en réserve qui attendent d'être exposés, ce qui ne sera pas possible dans notre hôtel particulier du XVIe siècle, classé aux monuments historiques depuis 1863. Mais on espère pouvoir exposer d'autres métiers que nous avons en réserve dans un espace proche.

 

La collection permanente, c'est l'espace muséal en tant que tel, donc les fameux 12.000 outils qui sont présentés dans 65 vitrines sur quatre grandes thématiques : les métiers liés au bois, les métiers liés au fer, les métiers liés à l'animal - tout ce qui est peau et crin - et la dernière salle qui est dédiée au minéral, ça va du potier jusqu'au tailleur de pierre en passant par l'ardoisier.

Le plus impressionnant n'est pas le nombre d'outils, mais la scénographie. Dans les vitrines, ceux-ci prennent vie, comme sils étaient encore tenus par les ouvrières et ouvriers qui les ont manié toute leur vie.

C'est l'œuvre du scénographe Daniel Pillant, qui a réalisé 61 de nos 65 vitrines. Nous avons souhaité, avec les Compagnons, que ces outils soient mis en scène vraiment et ne pas faire comme certains ont fait, dans des musées d'art et traditions populaires, de présenter des outils soit affichés au mur ou soit présentes sur des tables vitrines. Nous, on a vraiment souhaité les mettre en scène pour qu'ils racontent leurs histoires. 

Et c'est réussi. Qu'il s'agisse du marteau du cordonnier ou de la hache du bûcheron, chaque outil est unique. C'est d'ailleurs la philosophie du MOPO : si, pour certains, il s'agit d'instruments sans identité, pour les ouvriers de l'époque c'était un accessoire indispensable à leur vie, qu'ils maniaient au quotidien pour presque toute leur vie. Le musée a voulu exprimer cette notion en exposant les outils.

Ce n'est d'ailleurs pas qu'en France que la scénographie du MOPO est connue. Le conservateur en chef pour le musée Takenaka (musée des outils de charpenterie et de menuiserie) à Kobe, au Japon, est venu rendre visite à Christophe Cheutin pour lui demander conseil quant à la mise en scène de leur nouvelle exposition sur les outils occidentaux.

Nous allons travailler avec eux pour scénographier la nouvelle vitrine dite "des métiers européens" qu'ils ont au sein de leur musée. Il est venu ici pour voir comment je pouvais l'accompagner et l'aider à ce sujet, ne serait-ce que déjà aussi pour inventorier leurs outils dits "européens", parce qu'ils sont en recherche de compétences à ce niveau-là, et également pour les mettre en scène. Parce que c'est très très codé, figé au mur, et donc, là, il a pu découvrir notre espace muséal, et il a été émerveillé de cette scénographie. 

C'est vrai que c'est ce qui fait notre particularité, tous les outils sont en mouvement. Alors certes, certains sont présentés figés sur des présentoirs, mais toujours en volume, pour pouvoir l'apprécier en 3D et c'est pour cela aussi qu'on a été maintes fois primés.

En 2017, le MOPO a, par exemple, été Lauréat  du prix Liliane Bettancourt pour l'intelligence de la main, dans la catégorie Parcours, pour son travail sur la conservation et la mise en valeur des savoir-faire artisanaux et ouvriers.

Lors de la basse saison, le MOPO est fermé tous les mardi jusqu'au mois de mars. Les autres jours, chacun peut y accéder et aller voir l'exposition temporaire sur la cristallerie royale de Champagne de Bayel et la librairie en accès libre, ou aller se détendre dans la cours de l'hôtel tout en cueillant les fruits et plantes du jardin partagé.